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Le clinicien face aux politiques de soin et de prévention

Dr Pascal Griglio – Médecin au Centre Médical du Mont-Blanc (février 2007)

 

ACCUEIL DE L’EQUIPE d’ADDICTOLOGIE DU CENTRE HOSPITALIER D’ANNECY


Ebauche de travail en réseau

 

I. Présentation du centre médical le Mont Blanc en cours de restructuration

La clinique est en cours de restructuration

Passage de 180 à 90 lits autour du 14 février, avec diminution progressive amorcée.

Modification des équipes de soins au cours d’un plan social

Réflexion sur un nouveau projet médical d’établissement menée en groupes pluridisciplinaires (Infirmières Diplômée d'Etat, Aides-soignantes, psychologues, psychomotricien, Diététicien, Médecins) à partir de l’été dernier, en accord avec la politique de soin fixée par les tutelles.

1er rappel des tutelles : recrutement loco-régional de nos patients qui doit atteindre 80% des lits début 2009 (180 autour de 36 %, 120, autour de 50 %…).

Confirmer le travail en réseau, en tenant compte de la situation épidémiologique et les structures de l’offre de soins dans le champ des addictions au plan départemental et régional.

Sur le plan départemental, nous entretenons de liens avec les CAA du département ainsi qu’avec les services de médecine des hôpitaux du Léman et d’Annecy.

Par contre les liens avec le Centre Hospitalier de notre secteur (Sallanches) sont complexes depuis quelques années, d’autant plus que se détachent de cet établissement quelques lits d’alcoologie sur le site de Chamonix. Une de nos prochaines missions sera l’approche de cet établissement.

Depuis cet automne : une nouvelle piste de travail en réseau se profile : L'élargissement du réseau alcoologique à un réseau addictologique.

Compatibilité avec :

  • d’une part l’évolution de nos patients de plus en plus jeunes avec bien souvent un ou plusieurs produits autres que l’alcool.
  • la politique de soin : référence au plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l’alcool.

L’équipe d’addictologie du Centre Hospitalier d’Annecy dirigée par le Dr CAGNET (Médecin Psychiatre), recherche une structure pouvant prendre en charge certains post-sevrage d’opiacés ( Subutex® et héroïne ).

Le Dr Cagnet travaille à la fois au Lac D’argent, association à Annecy prenant en charge le soin ambulatoire et la prévention dans le domaine de la toxicomanie et au Centre Hospitalier d’Annecy où il a des lits de sevrage dans le service médecine interne – infectiologie.

Un rapprochement se déroule en douceur car il y a des résistances de chaque côté :

  • du côté d’Annecy, car beaucoup de bruits circulaient sur la restructuration voire la fermeture du Mont Blanc d’une part, et d’autre part l’équipe d’addictologie ne connaît pas le Mont Blanc et nos méthodes de travail.
  • De notre côté, les résistances du personnel sont centrées sur la peur de la prise en charge d’un patient toxicomane, alors que (mais peut-être parce que nous en avons régulièrement sous couvert d’une prise en charge alcoloogique.

Nous avons donc décidé de réunir l’équipe d’addictologie et notre personnel afin d’organiser une rencontre débat et une visite du Centre du Mont Blanc.

Cette rencontre s’est déroulée le 30 janvier 2007.

Préalablement le Dr Cagnet m’avait demandé de lui remonter un premier jet de questions du personnel.

J’ai ainsi réuni au cours du mois de novembre, l’ensemble du personnel par petits groupes, afin de mettre par écrit les inquiétudes et les questionnements autour de la prise en charge du patient toxicomane.

4 groupes d’une heure chacun : Je vous fais passer le résumé des questions recueillies.

II. Mardi, la journée s’est déroulée ainsi

Arrivée de l’équipe d’Annecy à 12 h 30, composée de : Dr Cagnet, Dr Michaud Praticien Hospitalier, 2 Infirmières et 1 Educateur Spécialisé.

Nous nous sommes réunis en comité restreint en salle à manger dans un premier temps afin d’échanger autour d’un repas. Ces premiers échanges ont tourné essentiellement autour du fonctionnement du Lac D’argent et des lits de sevrages d’Annecy.

Puis à 14 heures a eu lieu la réunion générale avec l’ensemble du personnel avec débat et ébauches de réponses aux questionnements.

Je vais essayer de faire la synthèse de ces échanges.

Plusieurs points principaux :

II. 1 – le partenariat

Une des résistances à la prise en charge de patients toxicomanes est l’absence de liens avec l’adresseur en dehors du formulaire de demande d’admission dans lequel les renseignements notés sont parfois loin de la réalité  L’alcool n’est qu’un prétexte à la demande de séjour et les autres produits sont occultés.

Nous nous retrouvons donc dans des situations compliquées avec des patients non demandeurs de soins qui aménagent la poursuite de leurs consommations avec le règlement intérieur, le cadre de soin, engendrant du trafic, parfois de la violence et une ambiance bien peu rassurante pour les autres patients.

Dans le cas présent, il s’agirait d’un partenariat avec transparence de part et d’autre.

L’adresseur s’engagerait à nous adresser des patients ne présentant pas des troubles psychiatriques associés, et dans une continuité de soins. Le patient  aurait connaissance du cadre de soin proposé avant d’accepter.

Et nous, nous connaissons la nature du ou des produits de dépendance du sujet, donc pas de surprises.

Le Dr Cagnet note que ce partenariat est un élément rassurant pour le patient.

II. 2. Nous en venons au cadre de soins proposé : là beaucoup de questions sont
évoquées

Les limites, les transgressions acceptables, non acceptables :

1°)   Concernant le produit principal en cours de sevrage, la conduite est claire :

En cas de reprise de produit, le patient quitte l’établissement.

Le partenariat permet en cas de rupture de contrat d’être clair avec l’adresseur, l’avertir de la décision afin qu’il puisse récupérer le patient en ambulatoire.

Ce point nous amène sur le dépistage d’un comportement faisant évoquer la reprise d’un opiacé et la décision de demande d’un contrôle urinaire : là nous recoupons une demande récurrente qui est la formation du personnel.

2°)  Concernant les autres produits la conduite à tenir est moins évidente :

Pour l’alcool par exemple, nous pensons que le contrat d’abstinence d’alcool est le même que pour les patients alcooliques avec surveillances régulières. Cet élément sera connu avant le séjour par le patient.  Mais en cas de sortie de contrat : est-ce l’exclusion systématique ou bien comme avec les patients alcooliques après un temps de discussion et d’évaluation des motivations du séjour, la possibilité de fixer un nouveau contrat ? Pas de réponse à ce jour. Il nous renvoie à une réflexion en interne.

Pour le cannabis, la question est encore plus complexe car les moyens de contrôle  sont limités voire inexistants. La persistance à 3 semaines voire jusqu’à 2 mois de cannabis dans les urines même pour des consommations faibles ne permet pas de détecter une consommation récente.

D’autre part  le règlement intérieur note l’interdiction de fumer du cannabis dans l’établissement.

Nous demandons au Dr Cagnet son expérience.

En fait il aborde la consommation éventuelle avec le patient, la fréquence, le risque d’augmentation au cours du  sevrage de l’opiacé, lui demande s'il en a rentré, si un visiteur risque de lui en  apporter, est-ce que l’arrêt du produit sera insupportable ?

Il lui rappelle les limites, l’interdiction de consommer, de se faire fournir dans l’hôpital, de sortir de l’enceinte de l’hôpital.

Enfin si le joint est incontournable, il est amené parfois à un arrangement dont il se porte garant : il lui demande de se débrouiller pour ne pas se faire prendre en dehors du bâtiment, mais dans l’enceinte de l’hôpital.

Cette décision d’élargissement du cadre se fait en accord avec l’équipe de soins et est notée dans les transmissions.

Si il se fait prendre par une IDE : discussion le lendemain, s'il se fait prendre par un gardien : exclusion administrative.

Est-ce applicable dans notre structure ? Pas de réponse à ce jour, mais jusqu’à ce jour nous faisons l’autruche, est-ce une meilleure formule ? Donc il nous renvoie à une réflexion en interne.

Finalement on en revient à la qualité de la relation thérapeutique et la transparence du discours sur les différents produits.

D’autre part, nous rejoignons la question de la "balance" évoquée au cours d’une réunion : les ASH qui sont  régulièrement dans les chambres des patients sont amenées à trouver du cannabis ou autres produits. Elles ne savent pas quoi en faire jusqu’à ce jour.

Projet de les intégrer dans les réunions de synthèse afin qu’elles  puissent être au courant des décisions concernant le cadre de soin, l’évolution du patient. Cela peut les aider à apporter une information médicale à une équipe de soins, et non à être une balance d’informations.

Enfin la question de la fouille est abordée : Plusieurs points sont soulevés :

Une fouille systématique à l’entrée est compliquée, l’imagination du patient peut-être parfois grande pour entrer des produits ou médicaments. La réalisation concrète de la fouille est compliquée, par qui, jusqu’où ?

N’est-ce pas déresponsabiliser le patient ?

Certains patients gardent quelque chose dans les poches, pour se rassurer …

Peut-être annoncer avant le séjour qu’une fouille est possible… ?

Nous devons y réfléchir en interne.

La question d’un cadre de soin écrit s’est posée : nous pensons que c’est à double tranchant, si trop de points concernant le cadre sont notés, ce dernier ne sera jamais complètement respecté, et là on ne saura plus quoi faire… donc faut-il rester sur un cadre oral ? Nous devons y réfléchir.

Enfin, quel cadre de soins devons-nous proposer à ces patients, le même que les patients alcooliques ? Ce qui nous fait glisser vers un autre point de questionnement récurrent :

II. 3. Existe-t-il un profil particulier du toxicomane, qu’en est-il de la violence,de
l’agressivité ? Faut-il envisager une PEC spécifique ?

Le Dr Cagnet ainsi que son équipe n’envisage pas de personnalité particulière au toxicomane, ils notent des modes de consommation différents en fonction des âges et générations, mais aussi une évolution historique des consommations, et des différences personnelles et sociales  de consommation et rappellent  que nous sommes en charge de patients qui ont utilisé des produits pour calmer leurs angoisses, sortir de la réalité.

Il aborde trois sujets :

Les représentations que nous avons du toxicomane que nous devons travailler en interne en module de formation afin de faire tomber nos peurs et à priori.

La question de la délinquance et du trafic inscrite dans l’histoire et nos représentations : son expérience montre  (pour rappel une moyenne de 2 sevrages par semaine) qu’il y a environ 1 % de patients qui pose des problèmes de ce type, en général ça se termine par une exclusion du soin et ils ne s’en débarrasseront pas chez nous.

Par contre il note de ne pas confondre la délinquance, la violence et l’énervement voire la fuite dans la nuit en cas de manque au cours du sevrage, ce qui peut être aménagé par une adaptation thérapeutique.

Concernant les troubles psychiatriques,  associés à la toxicomanie, nous ne les verrons pas, ils sont orientés en psychiatrie.

Il note d’autre part que les états limites existent aussi chez les patients alcooliques.

Nous avions admis qu’effectivement les crises d’énervement ou de violence n’étaient pas particulièrement en relation avec les toxicomanes.

Un programme spécifique pour le patient ? Le Dr Cagnet ne répond pas directement à la question, mais note l’indication du séjour :

L’éloignement temporaire du patient des contacts et lieux habituels de vie, voire d’une situation familiale et ou sociale délétère.

A la sortie du sevrage le patient est fragilisé psychologiquement, le soutien psychologique a sa place, il peut persister des signes de manque résiduels et des complications somatiques à surveiller par l’approche médicale. Les patients sont angoissés, les thérapies corporelles et la relaxation ont toute leur importance. Enfin le soin doit s’engager dans un lieu accueillant et rassurant, ce qui nous renvoie à la qualité de la relation thérapeutique et au cadre de soin.

Depuis quelques années l’expérience nous mettant en face de patients poly toxicomanes de plus en plus, nous avions anticipé en élargissant certaines réunions d’information au delà de l’alcool.

Un des derniers points questionné et abordé était le quota de patients en post sevrage opiacé que nous pouvons prendre dans notre structure et si il y a une tranche d’âge particulière.

Cette question nous renvoie sur la peur du regroupement des patients entre eux en fonction de leur addiction, de leur âge.

Par expérience,  nous observons chez nos patients alcooliques des regroupements en fonction des générations, des patients mal stabilisés…. Nous observons aussi un mélange des générations de plus en plus important, peut-être dû à un accès plus tôt au soin et ou à un rajeunissement de la population addictive.

Nous sommes donc déjà confrontés à plusieurs tranches d’âge dans l’établissement, sans problème majeur pour les patients et les équipes de soins, l’adaptation s’est faite progressivement.

Quant au quota, à nous d’y réfléchir.

III. En conclusion

Toutes les questions n’ont pas pu être abordées car le temps est passé très vite et nous arrivions à 16 h 30.

Nous sommes dans une démarche d’approche en vue d’une coopération addictologique avec l’équipe du Centre Hospitalier d’Annecy.

Notre fonctionnement permet déjà la prise en charge de patients dépendants à un, deux,  voire plusieurs produits. Notre expérience nous permettrait d’envisager cette collaboration dans le respect de la transmission des informations, le respect du parcours thérapeutique et l’évaluation des soins. Des adaptations sont à réfléchir, en plusieurs étapes :

Un travail interne de formation sur les représentations du patient toxicomane, qui pourrait être proposé par un organisme extérieur à l’établissement, ou peut-être le Lac d’Argent sous forme de modules à définir en fonction du nombre de participants et des catégories professionnelles.

Une réflexion interne avec l’ensemble du personnel pour aménager un cadre de soin possible avec les deux types de patients.

Le partenariat n’est pas ponctuel, mais doit se pérenniser par des "piqûres de rappel" régulières, réunions de travail communes à définir, maintien d’une formation continue, devenir des patients notamment dans le cadre de l’évaluation des pratiques professionnelles. Un prochain rendez-vous pourrait être programmé en février à Annecy.

La journée s’est terminée par la visite de l’établissement avec l’explication des différentes activités thérapeutiques proposées pour nos patients, programme redéfini pour le passage à 90 lits. Nous leur laissons la documentation écrite.

A suivre….

PREPARATION DE L'INTERVENTION du Dr CAGNET, Médecin Psychiatre au CENTRE HOSPITALIER D'ANNECY

Quatre réunions ont été programmées : deux avec les ASH, une avec les psychologues et psychomotriciennes et une avec les infirmières et médecins adjoints.

Les questions abordées étaient en relation avec l’élargissement de la prise en charge des patients au Mont blanc dans le cadre de la restructuration à 90 lits, élargissement addictologique versus alcoologique actuel.

Voici le résumé des réunions :

I. Synthèse des deux réunions avec les ash

Elles ont émis la crainte d’une augmentation de l’agressivité des patients avec le personnel, du risque de regroupement de ce type de patients entre eux et du coup du risque de trafic de produits illicites et de vols.

Elles se posent la question de l’agressivité, de l’humeur instable en terme de manque ou de fonctionnement particulier du patient toxicomane. En même temps notent que ces états existent aussi avec certains patients malades alcooliques.

Elles s’interrogent sur la relation problèmes psychiatriques et toxicomanie : est-ce une association fréquente ?

Elles comprennent que ce sont des malades, mais émettent un besoin de formation pour mieux comprendre ce qu’est la toxicomanie, les différences ou ressemblances avec les alcooliques.

Elles notent un manque de communication avec le personnel soignant paramédical et médical : elles aimeraient se sentir plus soutenues et encadrées et surtout que le cadre soit cohérent entre ce qui est énoncé dans le règlement intérieur, le contrat de soin et la réalité.

Elles se posent aussi la question des contrôles pour les produits illicites : à l’entrée, en cours de séjour : fouilles, examens biologiques.

Elles désirent participer aux réunions de synthèse au moins une partie pour apporter ce qu’elles entendent et voient du patient.

En effet, elles disent ne pas savoir quoi faire de ce qu’elles voient parfois, notamment le passage de produits dans les chambres, les couloirs, et ont peur d’être une "balance" si elles en parlent à l’équipe soignante. Elles aimeraient que leur rôle soit défini dans de telles constatations.

En résumé : elles demandent plus de connaissances sur les maladies de dépendance,  une meilleure communication  avec les équipes de soins et s’interrogent sur le cadre de soins qui est déjà difficile parfois avec les malades alcooliques.

II. synthèse de la réunion avec les psychomotriciennes et les psychologues

Dans un premier temps, elles pensent qu’il n’y a pas de spécificité de prise en charge des polytoxicomanies par rapport aux malades alcooliques.

Elles mettent en avant la demande du patient au sein de  l’établissement : quelle est la démarche du patient : arrêt des produits, d’un produit ?

Concernant le cannabis : elles notent le paradoxe de l’abord de la prise du produit avec le patient, qui ne vient pas forcement pour l’arrêt de ce produit et le règlement intérieur qui interdit l’usage.

Elles se posent aussi la question de la limite entre l’usage et l’usage pathologique du cannabis.

Elles pensent que si on élargit à une prise en charge addictologique, il faudra préparer la venue du patient en travaillant en lien avec l’adresseur, en précisant le but du séjour et la demande du patient.

Elles abordent aussi le travail avec les familles, quelle place dans notre fonctionnement institutionnel. Quelles réponses à de familles qui ne sont pas en demande "d’éradication" de tous les produits mais surtout de l’alcool.

Quelles formations les équipes doivent-elles suivre ?

Finalement, les équipes s’interrogent sur les différences de prise en charge entre les problèmes d’alcool et les drogues "dures".

Est-ce que notre cadre de soin est adapté ? Notre formation alcool est-elle suffisante ?

Que pouvons-nous apporter au patient dans le fonctionnement actuel de nos soins, quelles améliorations ?

Elles se demandent si la mise en place d’une collaboration addictologique en réseau actuellement n’est pas un peu prématurée.

III. synthèse de la réunion avec les ide et les médecins adjoints

Les personnes présentes s’interrogent sur :

Existe-t-il un profil particulier du polytoxicomane par rapport au patient alcoolique "classique" ?

Quel est le temps de sortie de la période critique de la dépendance à l’héroïne ?

Est-ce que l’arrêt de l’alcool peut fragiliser le traitement de substitution ?

Est-ce que les différentes populations peuvent cohabiter ? Cocaïnomanes, héroïnomanes, alcooliques ?

Quelle est la tolérance maximale par service de toxicomanes par rapport au cadre de soin ?

Y-a t-il un risque de repérage de patients entre eux et du coup de trafic de produits ?

Du coup le sujet a évolué sur le cadre de soins :

Faut-il envisager un engagement écrit avant l’admission du règlement intérieur, du contrat de soin ?

Que peut-on proposer au patient en soins en plus de notre prise en charge actuelle ? D’autres réunions d’informations (tabac, cannabis), d’autres groupes de parole ou ateliers thérapeutiques plus spécifiques aux produits autres que l’alcool ?

Doit-on se positionner établissement d’addictologie pour pouvoir aborder les différentes dépendances ?

Faut-il envisager la venue d’associations d’aide aux toxicomanes, comme les associations d’aide aux patients alcooliques qui interviennent régulièrement dans l’établissement ?

Comment le patient va s’inscrire dans un réseau de soins en sortant de l’établissement si il ne l’est pas encore à l’entrée ?

Quelle est la durée du séjour, comment se définit-elle ? Trop longue, pas assez ?

Concernant la gestion du traitement : doit-elle être systématiquement faite à l’infirmerie en présence de l’IDE, quand peut –on envisager d’élargir ?

La méthadone contient de l’alcool : ambiguïté avec un discours d’arrêt total de l’alcool.

Comment repérer la prise de produits en plus des traitements ?

Contrôles urinaires ? S'il revient positif, quelle attitude adopter ?

On en revient sur le cadre de soins : les limites, les transgressions acceptables, non acceptables.

En ce qui concerne le cannabis : comment accompagner dans le soin un patient qui continue de fumer du cannabis et qui clame qu’il n’est pas là pour ce produit qui ne lui pose pas de problème ?

Enfin en ce qui concerne les nouveaux produits de dépendance et donc la formation continue comment pouvons-nous nous former et maintenir nos connaissances ?

Chez les patients toxicomanes substitués, quels sont les critères de stabilité de leur toxicomanie afin d’envisager une prise en charge alcoologique ?

Dans un établissement de 90 lits, quelles sont les limites en nombre de tels patients ?

 

Docteur Laure NACACHE – CSST Hôpital Edouard Herriot. (février 2007)

Ce choix de thème nous permet d’aborder une approche évolutive des pratiques cliniques confrontées aux représentations, le tout au sein de choix et d’impératifs politiques successifs Cela peut permettre au soignant de trouver, ou de retrouver, du sens…

L’évolution des prises en charge concernant l’alcool et le tabac ne sera pas abordée dans cet exposé.


EVOLUTION DES PRISES EN CHARGE AUTOUR DES DROGUES ILLICITES

I - La loi de 1970

I – 1. Le versant législatif

La loi du 31 décembre 1970 constitue le cadre légal dans lequel s’inscrit la politique française de lutte contre la drogue depuis plus de 30 ans. Cette loi réprime l’usage et le trafic de stupéfiants, en distinguant clairement ces deux aspects. Si la loi de 70 a fait  l’objet de nombreuses présentations et analyses, nous souhaitons rappeler ici brièvement les objectifs de cette loi :

  • réprimer sévèrement le trafic,
  • poser le principe de l’interdiction de l’usage des stupéfiants tout en proposant une alternative thérapeutique à la répression de l’usage.
  • assurer la gratuité des soins et l’anonymat pour les usagers qui souhaitent se faire traiter.

Depuis 70 la répression du trafic a été renforcée à plusieurs reprises en augmentant les peines encourues ou en créant de nouveaux délits (offre, cession, blanchiment). La répression de l’usage, par contre, objet de débats incessants n’a pas été modifiée durant toutes ces années. Mais cette relative permanence sur le plan législatif ne doit pas masquer des évolutions assez marquées dans la mise en œuvre de la loi, telle qu’elle s’exprime tout du moins dans les circulaires et autres textes rédigés par les administrations en charge de la justice et de la santé.

Cette loi bicéphale avec un versant sanitaire et judiciaire a conditionné beaucoup de choses au niveau des présentations sociales en faisant de l’usager un délinquant et un malade. La double équation toxico = malade et toxico = délinquant sera intégrée dans le cadre du soin. En effet la loi de 70 sanctionne l’usage, publique ou privé, même sans nuisance perceptible par l’entourage, d’un an d’emprisonnement et/ou d’une amende.

Depuis les années 70 la tolérance et la sévérité d’application de cette loi a souvent été très variable, en fonction des départements et de l’atmosphère sociale. Cette loi d’exception avec des mesures dérogatoires (durée de garde à vue, horaires de perquisition) est davantage réfléchie comme une loi de protection de la société plutôt qu’une loi pour les usagers. Elle s’inscrit dans le mouvement de la lutte contre les fléaux sociaux. Les arguments de ceux qui défendent cette thèse sont ceux de l’escalade, du prosélytisme, de "la dette" minimum du soin du corps suite à la généralisation de la sécu).

I – 2. Le versant sanitaire

L’émergence du dispositif spécialisé : une fois posé le principe de l’accès gratuit de façon anonyme aux soins pour les usagers de drogues, il fallait organiser concrètement les modalités de cette prise en charge : qui devait traiter les usagers de drogues et quel type de soins fallait-il leur donner ? Les ministères de la Justice et de la Santé établissent conjointement, dès 1971, une liste des établissements agréés pour organiser les cures de désintoxication. Mais dans l’ensemble, le secteur sanitaire traditionnel se montre réticent à accueillir des usagers de drogues perçus comme perturbateurs difficiles à contrôler et qui  ne sont décidément pas des malades comme les autres…

Les quelques individualités prêtes à s’investir sur la question de la toxicomanie – souvent des psychologues et des psychiatres – sont favorables à la création de structures spécialisées pour les usagers de drogues. Avec l’ouverture des centres Marmottan en 71 par l’équipe du Docteur OLIVENSTEIN, le dispositif s’oriente donc vers la spécialisation. Celle-ci ne fera que se renforcer au fil des années, les établissements sanitaires traditionnels préférant se décharger des usagers de drogues sur les structures nouvellement créées. De plus, Au début des années 70 le traitement de la toxicomanie est un domaine encore peu connu donc propice à l’expérimentation.

II - Les années 70 ou années d’expérimentation

II – 1. Du côté politique ou judiciaire

La première circulaire d’application du ministère de la Justice rappelle en préambule que la nouvelle loi a pour objet à la foi d’aggraver les pénalités en matière de trafic et d’inciter les usagers à se faire soigner. Tout en laissant au Parquet la liberté d’appréciation au cas par cas, la circulaire indique que l’incrimination d’usage doit être utilisée pour les faits d’acquisition, de détention et de transport pour usage personnel (et non pas pour des faits de cession ou d’offre). Cette circulaire rappelle également que la détention provisoire est exclue pour les personnes inculpées pour seul usage de stupéfiants. Mais ces recommandations n’ont apparemment pas été suivies par tous les parquets puisqu’une circulaire de 73 critique, en les qualifiant « d’errements », les poursuites d’usagers au titre de l’article L 627 (qui réprime le trafic) pour la détention de quantité négligeable de produits ainsi que de procédures de flagrants délits utilisées à leur encontre.

1977 est marquée par la publication du rapport de la commission Pelletier qui établit à la demande du Président de la République, un premier bilan de la politique de lutte contre la drogue sept ans après l’adoption de la loi. En ce qui concerne les usagers, le rapport regrette que la voie judiciaire reste de loin la plus empruntée, et constate l’augmentation régulière du nombre des usagers mis en détention provisoire. Le rapport souligne également qu’en dépit des intentions, l’alternative thérapeutique inscrite dans la loi fonctionne mal. Quantitativement les injonctions thérapeutiques restent minoritaires par rapport aux condamnations pour usages. Dans ce rapport Pelletier, c’est la première fois qu’est proposé de différencier les usagers de drogue selon le produit consommé et en particulier l’usager de cannabis qui selon lui ne peut être considéré comme un « véritable » toxicomane, ne relevant pas d’une cure de sevrage et de disposition de la loi sur l’injonction thérapeutique.

Cette circulaire a été perçue, à l’époque comme dépénalisante, de fait, de l’usage de cannabis. Comme toutes les circulaires, elle exprime les intentions du ministère de la justice, mais a pu être diversement appliquée par les parquets. Elle restera cependant la référence jusqu’en 1987.

II – 2.  D’un point de vue sanitaire

La mise en place du système spécialisé de soins aux toxicomanes s’organise donc à cette époque, dans une situation de croissance économique, le projet thérapeutique abordant de façon presque exclusive la prise en charge dans le cadre du sevrage, en privilégiant les aspects psychologiques et éducatifs.  Le sevrage n’est pas entièrement exclusif puisqu’une distribution de méthadone existe dans deux services hospitaliers (hôpital Sainte Anne et hôpital Fernand Vidal) dès le début des années 70, mais rencontrant beaucoup d’indifférence et d’hostilité, il ne trouvera que peu de soutien.  A cette époque les traitements de substitution et les complications somatiques  sont encore méconnus.

Les années 70 peuvent donc s’assimiler donc aux années d’expérimentation dans les structures de soins et de post-cures, c’est d’autant une expérience que les soins proposés découlent d’une loi comme nous l’avons déjà rappelé, qui est d’une loi d’exception. En effet il n’existe pour aucun autre symptôme un dispositif aussi élaboré et légiféré. Se pose alors le problème de l’idéologie d’un soin qui s’organise autour d’un symptôme, cet arbre qui cache la forêt.

De plus du côté de l’alternative aux soins pour éviter les poursuites, dès 1973, on parle d’échec en fait il y aurait plusieurs raisons à cela :

  • les juristes et les médecins ne travaillent pas dans la même logique, les uns dans un rapport au public et à la société, les autres dans un rapport individuel, de secret. Aussi les injonctions thérapeutiques sont très variables, de zéro à chaque usager…

  • raisons structurelles : c’est-à-dire en matière de procédure on a plus simple, comme :

-          classement sans suite : avec ou sans condition, (soins par exemple), cela concerne 70 % des interpellés pour usage et cela se fait par le procureur,

-          admonestation par la police,

-          mise en garde par le procureur,

-          composition pénale le procureur passe par la police et ainsi les amendes sont moins chères,

-          ajournement pour que le sujet revienne désintoxiqué.

A Lyon, ce dispositif initial est organisé autour d’un service d’urgence hospitalier, les intervenants spécialisés suivant les toxicomanes dans les différents services de l’hôpital où ils sont accueillis. Pour différentes raisons (difficulté d’intégration des intervenants au sein des équipes hospitalières, spécialisation grandissante des services de médecine réduisant leur tolérance) l’accueil et la prise en charge des toxicomanes se sont progressivement réduits aux seuls pavillons d’urgence.

Dans cette expérimentation, en pratique, le sevrage et l’abstinence restent les objectifs à court terme de la loi et des tous nouveaux professionnels spécialisés en toxicomanie, encore une fois faut-il entrer en contact avec la population des usagers de drogues ! De même, à l’issue du sevrage, il apparaît nécessaire d’aménager la transition avec une existence sans drogue (post-cure, famille d’accueil).

Aussi, adoptant une politique de soutien à l’expérimentation, le ministère de la santé est amené à subventionner de nombreux projets de centres d’accueil et de post-cures ou à visée préventive, présentés par le secteur associatif, naturellement plus souple et plus porté à l’innovation que les structures publiques. L’importance du secteur associatif restera l’un des traits marquants du dispositif sanitaire et social français de lutte contre la toxicomanie. Au cours des années 70, le dispositif émergent est donc dans une phase pionnière, marquée par l’utopie communautaire, centré sur l’accueil et la création d’une relation  de confiance avec les usagers de drogue.

III - Les années 80 ou années de professionnalisation

III – 1. Sur un plan politique et judiciaire

Sur le plan pénal, la décennie des années 80 apparaît comme une période marquée par la problématique de la sécurité au cours de laquelle s’affirme la volonté de renforcer la répression à l’égard du trafic, des usagers revendeurs et des actes de délinquance commis par les usagers. Les projets préconisant une attitude plus contraignante à l’égard des usagers n’ayant pu aboutir, cette période débouche finalement sur la relance de l’injonction thérapeutique. Les pouvoirs publics sont alors amenés à améliorer la mise en œuvre de cette mesure.

Une circulaire de 84 déplore encore des peines de prison ferme, même rare, encore prononcées pour un simple usage mais en même temps elle s’inquiète de la progression de la délinquance liée à la toxicomanie. La circulaire s’intéresse donc de près à l’usage / revente. Elle invite les procureurs à rechercher si la qualité de trafiquant ne prime pas sur la qualité d’usager chez les usagers revendeurs et selon le rapport Trautmann cette circulaire a modifié profondément l’approche pénale du problème, "en tendant à ne plus excuser un délit par l’usage de drogue intégrant incarcération dans l’itinéraire ordinaire du toxicomane, toujours revendeur à un moment ou un autre".

La nouvelle majorité élue en 1986 entend modifier la loi de 70 dans un sens plus répressif et plus contraignant pour les grands trafiquants, les dealers et les usagers. Le Ministre de la Justice Albin Chalandon propose l’aggravation de peines de prison mais aussi la création de structures d’accueil et de soins en milieu pénitentiaire et l’augmentation de la prise en charge par les communautés thérapeutiques, en autorisant par exemple l’association le Patriarche à accueillir un nombre plus important d’usagers. Mais ce projet va susciter une forte opposition et les dispositions concernant l’usage seront finalement retirées du projet présenté par le gouvernement aux députés, laissant l’article L 628 inchangé.

La circulaire justice – santé du 12 mai 87 abroge les circulaires précédentes et introduit une nouvelle distinction au niveau de l’usage, en se basant non plus sur le produit, mais sur le caractère occasionnel ou répété de la consommation de produits stupéfiants. Selon elle les interpellations pour usage doivent faire l’objet d’un procès verbal  transmis au  parquet et si possible traitées par un magistrat spécialisé. Les usagers occasionnels s’ils sont bien insérés, doivent faire l’objet d’un simple avertissement. Pour les usagers « d’habitude », la circulaire recommande le recours à l’injonction thérapeutique ou aux poursuites. Les usagers étrangers en séjour irrégulier en France, doivent être jugés en comparution immédiate et faire l’objet d’une interdiction de territoire. Enfin les usagers trafiquants ou usagers délinquants doivent être prioritairement poursuivis du chef d’accusation de trafic ou de l’atteinte aux personnes ou aux biens. Cette circulaire marque également la volonté de relancer l’injonction thérapeutique et en précise les conditions d’application. Dans ce but des crédits supplémentaires seront mis à la disposition des DDASS en 1988.

Au début des années 80 l’action publique dans le domaine sanitaire et social sera enfin marquée par la volonté de rationalisation du dispositif spécialisé. Cela se traduira par une centralisation du pilotage du dispositif sanitaire et social. La lutte contre la toxicomanie demeure une compétence d’état. La totalité de la gestion et du financement sera assurée par le ministère de la santé et des affaires sociales. C’est ainsi que le dispositif, dont l’administration peut pour la première fois tracer le contour, entre dans une phase de normalisation et de consolidation. Les centres de soins spécialisés, ou psychologues et psychiatres occupent une place de plus en plus importante, offrent désormais, dans un nombre important de départements, des cures de sevrage avec accompagnement psychothérapique. Cependant (rapport Trautmann) des insuffisances persistent avec une répartition géographique inégale, un manque de réponse rapide à l’urgence psychosociale et une faiblesse de la démarche d’insertion et de réinsertion.

III – 2.  Sur le plan sanitaire

Le dispositif de prise en charge sort donc d’une phase pionnière pour entrer dans une phase plus professionnalisée, de plus en plus structurée autour du traitement de type psychothérapique. Le rapport Pelletier avait officialisé cette orientation, qui s’accompagne logiquement de la non prise en compte des autres options envisageables dans le traitement de la toxicomanie : les communautés thérapeutiques et la substitution à la méthadone. En effet ces deux modalités de traitement, expérimentées lors de la phase pionnière, se heurteront à l’opposition de la majorité de la profession. Dans le contexte des années 70, marquées par la méfiance à l’égard des institutions psychiatriques et de l’approche neurobiologique de la maladie mentale la distribution de méthadone dans deux services hospitaliers dès le début des années 70 rencontrent donc indifférence et hostilité et ne trouvera que peu de soutien. La grande majorité des professionnels du traitement de la toxicomanie rejette les conceptions comportementalistes et souvent autoritaires de certaines communautés thérapeutiques. Certaines en effet s’inspiraient d’institutions qui avaient pu être visitées dans les pays d’Amérique du Nord. C’est ainsi que Monique Pelletier prendra position contre cette approche du traitement et Simone Weill alors ministre de la santé, décidera de limiter la taille des communautés thérapeutiques.  En France le débat s’est focalisé sur une institution très controversée, patriarche, ce qui a probablement contribué à bloquer par la suite la réflexion sur l’intérêt éventuel des communautés thérapeutiques…

Au cours des années 80, le pôle somatique émerge avec une prévalence évidente chez les toxicomanes des hépatites B puis du sida et enfin du VHC. Ainsi les services de médecine (infectieux, gastro-entérologie...) se trouvent confrontés, parfois malgré eux, à la gestion de l’irruption de ces malades "d’un nouveau genre", avec à chaque fois des tâtonnements itératifs...

C’est le temps des hospitalisations aux urgences, la naissance des contrats de soins et de l’amélioration des connaissances des conséquences de la toxicomanie.

IV - Les années 90 ou années de pragmatisme

IV – 1.  Sur un plan pénal

La politique pénale menée dans le domaine de la lutte contre la drogue dans les années 90 se situe largement dans la continuité de celle engagée dans le courant des années 80, tant dans le domaine de l’usage que celui du trafic. Il y a une volonté de poursuivre l’effort de relance de l’injonction thérapeutique en recherchant des conditions permettant d’appliquer réellement ces mesures. Les autorités judiciaires, sanitaires et sociales sont invitées à améliorer leur coopération et à voter des conventions départementales d’objectifs en matière de toxicomanie et des contrats d’objectif en matière d’injonction thérapeutique.

IV – 2.  Sur un plan politique publique

Au cours des années 90 c’est un tournant, les orientations en matière de lutte contre la toxicomanie connaîtront un changement important. Ce tournant se traduit, notamment, par l’adoption officielle de la politique des réductions des risques. Le virage est pour l’essentiel pris en 93 avec le plan de la DGLDT, même s’il est abordé, au départ, avec une très grande prudence.

(Pour info : la DGLDT est née en 1990, de la fusion entre la DGLD et la MILT ; elle est rattachée au ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville. En 1996, elle est rebaptisée MILDT et placée sous l’autorité du Premier Ministre, ce qui favorisera son action)

La plupart des orientations prises en 93 seront confirmées et développées par la suite :

  • un premier aspect du plan triennal de 93 concernait l’amélioration de la prise en charge dans le dispositif spécialisé et dans le secteur sanitaire général avec notamment l’augmentation du nombre de places d’hébergement, l’amélioration de la prise en charge à l’hôpital et la constitution de réseau Ville-Hôpital toxicomanie.
  • le deuxième aspect : Développement du dispositif de réduction des risques.
  • le troisième : Elargissement de la substitution.

Le lancement du plan de 93 est accompagné de l’annonce de la mise en place de la nouvelle commission de réflexion sur les problèmes de drogues et de toxicomanie, présidée par le Professeur Roger HENRION, la commission remettra son rapport en février 95. Le rapport HENRION confirme dans l’ensemble les orientations prises en 93 dans le domaine sanitaire, tout en demandant au pouvoir public un développement plus rapide de la substitution et de la politique de réduction des risques. Le constat le plus important de ce rapport est l’aggravation de la situation, de l’état sanitaire des toxicomanes. Face à cette situation, mais aussi pour aider les usagers à sortir de leur dépendance, les membres de la commission proposent de réintégrer cette population exclue et marginalisée dans la société, notamment en ouvrant le système sanitaire de droit commun à la prise en charge des usagers de drogues.

IV – 3  sur un plan sanitaire

Années de pragmatisme (décade de normalisation pour Marc VALLEUR).

  • Les années substitution et Réseaux ville/Hôpital.
  • La fin du budget 47-15 de la ligne toxicomanie.
  • L’apparition du concept d’addictologie.
  • L’émergence des associations d’auto support.

V - Les années 2000 et Perspectives d’avenir

V – 1.  État actuel

Au début des années 2000 la MILDT confirme son choix d’une orientation vers l’addictologie en regroupant les dépendances concernant l’alcool, le tabac, ou les "toxicomanies sans produit".

En 2002 suite au changement politique par l’élection de Jacques CHIRAC, Madame MAESTRACCI est remplacée à la MILDT par le Docteur JAYLE. S’en est suivi un grand flou avec de nouvelles orientations qui laissent entendre parfois un sérieux retour en arrière, en particulier, avec l’abord de la problématique par les produits …

En 2003 la priorité politique s’appuie sur la refonte, la révision, ou la réforme de la loi de 70 … En effet fin juin, le Premier Ministre (Monsieur Raffarin) demande à la MILDT d’établir des groupes de travail afin de faire des propositions, cela dans un délai court établi au 15 septembre 2003. Différents événements, (telle que la canicule…) n’ont pas permis le positionnement des politiques…

V – 2.  Perspectives d’avenir

Il y a un nouveau plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l’alcool 2OO4-2OO8. Ce nouveau plan est articulé sur des orientations de santé publique. En effet dans la première loi de santé publique contre le cancer apparaît la lutte contre l’alcool et le tabac. Les méthodes de travail proposées sont très différentes dans la mesure où à partir de plans nationaux il existe des déclinaisons sur les départements, avec donc un passage fort aux collectivités territoriales. Ainsi la réorganisation du cadre départemental est à la charge des chefs de projets drogue et dépendance. En général ce sont les DDASS. Dans le Rhône, c’est le sous préfet chargé de la mission à la politique de la ville qui en assure la responsabilité. Celui-ci convoque un comité de pilotage avec des soignants, des agents de la sécurité, de l’éducation nationale, des gendarmes, le conseil général, etc. et décide des orientations au niveau départemental, au sein de ce comité le plus transversal possible. Ces orientations seront mises en œuvre dans le cadre des contrats ville. Les deux axes prioritaires de ce plan concernent la consommation de cannabis et le respect de la loi Evin dans les lieux publics.

2.1 – Objectif cannabis

L’idée est de « casser l’expansion du cannabis ». D’après les études,  la consommation de cannabis a presque doublé entre 1993 et 2OO2 pour les 18-44 ans. Par ailleurs en 2OO2, à 18 ans, 24 % des garçons et 9 % des filles ont un usage régulier. L’application de ces mesures s’appuiera sur la loi de 197O modifiée et le plan quinquennal. En ce qui concerne la refonte, la révision ou la réforme de la loi de 197O,  même si cela n’est toujours pas d’actualité, on peut déjà voir qu’elle s’articule autour de 5 axes :

1er axe : il s’agit d’un enjeu majeur. Organiser un dispositif de prévention en proposant une professionnalisation et une organisation de la prévention. La France accuse un retard conséquent et veut  ainsi donner un socle légal à cette prévention. Pour cela sont proposés :

-          Un plan pluriannuel de prévention.

-          Une inscription des programmes de prévention dans des politiques régionales et dans l’éducation nationale.

-          Obligation de chaque ministère d’instaurer ces programmes de prévention, notamment dans l’éducation nationale. Aujourd’hui il n’existe pas de cohérence du cursus primaire à la terminale.

-          Développement d’un référentiel d’intervention en prévention car il existe une trop grande hétérogénéité des pratiques.

2ème axe : repérage et intervention précoce. Le constat est celui d’une consommation importante chez les jeunes. Or la consommation précoce est un indicateur possible de difficultés ultérieures. On sent ici la préoccupation sur le développement des consommations de cannabis et la nécessité d’organiser ainsi des réponses pertinentes.

Au cannabis mais aussi aux drogues de synthèse, à l’alcool, au tabac.

Pour ces dernières notions les choses n’ont pas été simples puisqu’il semble qu’il ait fallu un long débat pour savoir si la MILDT conservait la compétence de l’ensemble des drogues, notamment sur le tabac.

L’idée est d’organiser auprès d’un public non-demandeur, et peu attiré par le système spécialisé, des consultations anonymes et gratuites pour un dépistage. Cela pourrait se faire dans des structures intermédiaires dans le cadre d’un à trois entretiens, pour une évaluation et un diagnostic de situation, plus ou moins orientation. Il ne s’agit pas directement de prise en charge, mais d’un sas vers l’ensemble du système de prise en charge. L’idée est d’aussi de créer un système facilement identifiable par les jeunes et par leurs parents.

3ème axe : la réduction des risques. C’est un point d’arbitrage, contrairement aux axes précédents qui étaient consensuels. La consolidation de la politique de la réduction des risques est davantage discutée dans la mesure de la redéfinition d’un socle législatif.

4ème axe : prise en charge socio sanitaire : maintien de la gratuité et de l’anonymat. Pose le principe de la  diversité des réponses thérapeutiques avec une obligation sur certains territoires.

5ème axe : la sanction. Discussion plus longue et plus compliquée.

-          Maintien de l’interdit sur l’usage de stupéfiants et les actes préparatoires.

-          Intérêt de mettre en place une pénalisation progressive permettant d’aggraver les peines quand récidive ou conditions particulières (telle qu’au sein d’une école…).

-          Suppression pour les premiers usages de l’emprisonnement. Garder cependant le délit pour la cinquième interpellation dans l’année…

-          Contraventionalisation : les contraventions existent de la première à la cinquième classe ; Exemple : troisième classe 450 euros maximum, quatrième classe 750 euros, cinquième classe 1 500 euros. Cependant certains parlent de la possibilité de forfaitiser ces contraventions avec un timbre amende (mais l’usager est-il comparable à une voiture ? !) pour une recherche d’une meilleure effectivité à raison de 68 ou 135 euros. Cette approche apparaît homogène plus effective et rapide.

Rappelons cependant que pour les mineurs et les majeurs réitérant, on parle d’une obligation de contact effective avec une structure socio sanitaire. L’amende pourrait être alors diminuée si l’obligation de contact a été suivie.

D’autres mesures comme la confiscation d’un véhicule (non retenue car disproportionnée) la suspension du véhicule ou du portable sont en cours.

L’objectif des tutelles est de responsabiliser les collectivités et de s’articuler avec le plan cancer pour le tabac et l’alcool. Les orientations passeront par des campagnes de communication autour du cannabis et des drogues de synthèse, une modification de DATIS (ouverture d’une ligne cannabis info-service et tabac info-service et de consultations cannabis, drogues de synthèse pour adolescents et parents, s’appuyant déjà sur un réseau existant dans le département.

2.2 - Objectif respect de la loi Evin

Le Rhône est apparu comme un site pilote quant aux missions d’action d’information et de rappel à la loi dans les lieux publics (gare, etc.).

Des modifications ont d’abord eu lieu à la SNCF avec circulaire  transmise à la Police pour lui rappeler sa mission de faire respecter la loi. Depuis 1er Février 2007, cette interdiction devra être respectée dans tous les lieux publics.

 

A propos de l'Intervention de Michel Kairo - Intervenant en alcoologie au Centre Hospitalier de l'Arbresle. (Pascale Chevry)

  • Michel Kairo, intervenant à l’hôpital de l’Arbresle, reprend l’historique de l’usage propre des drogues et de l’implication des membres d’associations telle que l’association Ruptures. Lors de sa présentation, nous avons noté son implication militante, déterminante dans son approche clinique, voire même avant-gardiste sur les décisions gouvernementales en politique de prévention et de soins des toxicomanies (par exemple, lorsque l’association faisait "le tour des commissariats" pour augmenter la tolérance des Stéribox® avant la loi).

Pour des raisons indépendantes de sa volonté, Michel Kairo n'a pas eu la possibilité de nous transmettre, à ce jour, un texte de sa communication.

Mise à jour le Jeudi, 18 Août 2011 16:11