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Buhrig - film - sans-abri...

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Extrait de film commenté : "Des sans-abri rencontrent des enfants"

Martine Buhrig, Responsable du SAR (Service d’Accompagnement Renforcé) et

Christine Berrin, Psychologue

Madame Martine Buhrig et Mme Christine Berrin du Service d’Accompagnement Renforcé, ont visionné et présenté le début du film "Comme des enfants" et ont répondu aux différentes questions des participants.

Propos de Christine Berrin, Psychologue,

Intervenante dans le cadre des temps de parole avec les enfants, de "l’Atelier des possibles" auprès des personnes sans-abri et des temps d’échange entre les enfants et les passagers.

Des rencontres qui ont ouvert pour chacun la possibilité de changer de regards et d’apprendre à poser sur l’autre, et par la même occasion sur soi, ce regard aimable.

Un engagement social, humain, inter institutionnel, un projet partagé, où chaque acteur a fait figure de tuteur  de développement et de résilience.

Le rapport à la souffrance, discours social, regards et représentations :

Les personnes sans-abri et les enfants nous alertent  sur la question du regard porté sur la souffrance, du discours social et des représentations.

Ils donnent à penser, à interroger, à toucher chacun et la société sur son propre rapport à la souffrance et sur la perte de sens : Suis-je aimable quand je souffre ? Est-ce que c’est honteux ? La souffrance est-elle un sentiment qui peut se donner à voir sans crainte de ne plus être reconnu ?

"C’est pas parce qu’ils sont sans-abri qu’ils ne faut pas les aimer !" diront les enfants.

Tout au long des rencontres les enfants ont su porter sur les personnes sans-abri ce regard aimable. A aucun moment ils les ont considéré  comme des personnes condamnées à être victimes de leurs souffrances, comme le porte par trop souvent le discours social.

Dans ce regard marqué d’un possible devenir, les usagers ont pu, dans ce sentiment à vivre qu’il leur a été offert, se sentir aimés. Ils ont pu se penser comme une personne aimable malgré la blessure individuelle : "L’idée que l’on se fait de ce qui nous est arrivé dépend beaucoup du regard de l’autre".

"Rien n’est jamais fichu" dira Mohamed aux enfants.

Les enfants reçoivent en retour le message que se penser comme quelqu’un d’aimable, permet dans la souffrance et le malheur, de garder espoir et de rebondir dans la vie.

Les enfants et les personnes sans-abri attirent ici notre attention sur le sens et la portée des représentations sociales rattachées à la question de la différence (culturelle, sociale, affective).

Les représentations sociales peuvent-elles aider à se représenter soi et l’autre dans un regard qui aide à grandir, à se développer et à s’estimer suffisamment. Ou peuvent-elles au contraire aider à générer de la honte en ajoutant de la blessure sociale ("Avec ce qui lui est arrivé il est fichu") à la blessure individuelle.

Blessure, exclusion, portée et impact du regard sur la souffrance:

"C’est fort ce que l’on a fait !" dira Michel à l’issue de la première projection du film.

"Des moments où on sent la pensée arriver", dira Aurélien 9 ans, au cours des rencontres avec les passagers et au moment des messages que les enfants destinent aux personnes sans-abri.

La "force" de la portée émotionnelle de ces rencontres, leur impact sur le public et sur l’ensemble des participants nous invitent à penser le sens et la portée même du regard social sur la souffrance.

Le regard peut être ce levier qui va aider à réparer les blessures et porter la personne à se développer malgré l’adversité. Porter un regard aimable sur la personne en souffrance c’est lui donner en retour la possibilité de se représenter comme quelqu’un d’aimable, parce ce qu’il se sent aimé.

Il peut être ce regard qui au contraire va aider à condamner celui en souffrance, à rester victime et prisonnier de son passé et contribuer ainsi à scléroser, à enfermer dans la pathologie, l’exclusion.

L’exclusion, la blessure sociale est par trop souvent le deuxième coup porté au traumatisme vécu par la personne. Il est facteur de traumatisme et génère de la honte.

Si le discours social reconnaît la blessure mais estime possible la reconstruction, la personne va s’atteler à cette tâche de reconstruction.

Penser, agir, regarder, écouter, se taire, avec en tête le mot "devenir", c’est aider à conduire, l’autre et soi, vers de nouveaux possibles. C’est alors que se provoquent des interactions qui soutiennent les processus de résilience.

Un engagement social et humain où chaque acteur a fait figure de tuteurs de développement :

C’est avec ces mots "devenir" et "possible" en tête, que chaque acteur du projet s’est fait tuteur de développement, de créativité, d’ouverture vers le vivant : les enfants pour les personnes sans-abri et les passagers pour les enfants, les professionnels pour les enfants, les personnes sans-abri, l’ensemble des participants et réciproquement.

Cette approche tutrice a pu l’être grâce à un engagement inter institutionnel facteur lui-même de résilience, et parce que le cadre à été suffisamment garant, sécurisant pour qu’un possible puisse s’agir et se penser.
Christine BERRIN

Propos de Martine Buhrig, Socio anthropologue,

Initiateur du projet.

Ce film, dont la qualité de réalisation par Nicolas Cornut et la sensibilité, ont mérité l’attribution d’un Howard de Euro Cités, présente de multiples facettes :

-          Rencontres intergénérationnelles,

-          Dynamique de quartier entre la Maison de l’enfance et le Foyer Notre-Dame des Sans-abri à Lyon,

-          Actions collectives et accompagnement social individualisé,

-          Participation active des usagers dans le cadre de la loi 2002,

-          Reconnaissance de la dignité humaine de la personne alcoolo-dépendante.

Plutôt que d’accentuer la stigmatisation des personnes sans abri en donnant à voir l’aspect sordide de leur situation, Nicolas Cornut a choisi de faire sentir la profondeur de l’humanité de ces hommes touchés par la rencontre des enfants. Et la place de la gentillesse, du rire et de l’humour y est centrale.

C’est pourquoi ce film est un outil puissant qui permet aux spectateurs de comprendre la réalité de l’exclusion, tout en changeant leur représentation des "personnes sans abri". Il est un outil privilégié pour les écoles de travailleurs sociaux, d’éducateurs et de psychologues.

Martine BUHRIG

PS : cocottesminute production, 38 rue de l’Université, 69007 Lyon

www.cocottesminute.fr

DVD : 19€

Mise à jour le Mercredi, 02 Novembre 2011 17:14